Le 27 février, le gouvernement français décide de fermer les frontières avec l'Espagne à partir du 1er mars pour des raisons de sécurité internationale. Cela entraîne la rupture de l'accord commercial franco-espagnol et l'interruption du transport postal et du transit des voyageurs.

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale se pose la question de l'attitude des pays alliés envers l'Espagne et le régime franquiste. Le 12 décembre 1945, le ministre français des Affaires étrangères, Georges Bidault, remet des notes aux ambassadeurs américain et britannique en proposant de rompre les relations diplomatiques avec l'Espagne. La complexité de la situation tient au fait que les Français ne se sont pas tournés vers l'URSS, le prétexte formel étant que Moscou n'avait pas de relations diplomatiques avec Madrid. Néanmoins, c’est la première action de cette ampleur entreprise par les alliés sans participation soviétique.

Le secrétaire d'État adjoint américain James Clement Dunn déclare à l'ambassadeur espagnol Juan Francisco de Cardenas le 19 décembre à Washington que les États-Unis «devront probablement rompre» leurs relations avec l'Espagne.

Londres estime que toute action contre Franco ne doit être entreprise que conjointement, mais craint que, si les républicains gagnent en Espagne, la gauche prenne le pouvoir, ce qui conduirait à une autre guerre civile.

En URSS, l'attitude envers le régime de Franco est extrêmement négative. Des soldats espagnols ont combattu du côté des nazis. La Division Bleue espagnole s'est distinguée par les destructions et les pillages à Tsarskoïe Selo, la participation au siège de Leningrad et les massacres de civils.

Lors de la première session de l'assemblée générale des Nations unies, la situation en Espagne fait l'objet d'un examen à part. Le représentant de l'URSS, Andreï Gromyko, déclare:

«Il serait faux de penser que la victoire militaire sur le fascisme enlève de l'ordre du jour un autre combat acharné pour l'éradication et l'élimination complète des foyers du fascisme qui subsistent encore. Ce combat pour éradiquer les restes du fascisme ne peut être séparé du travail de notre organisation.»

Cependant, il n'y a pas de consensus sur la question soulevée par la France. Une question importante demeure: l'une des «ratlines» (réseaux d’exfiltration nazis) utilisées par l'organisation fasciste ODESSA pour permettre aux criminels de guerre nazis d'échapper à la justice, passe par la frontière avec l'Espagne. La France fait preuve de volonté politique en fermant la frontière, mais n’est pas en mesure d'obtenir un consensus sur la fin des relations diplomatiques avec le régime de Franco par les pays alliés.


Source:
La Pravda, 1er mars 1946.